MAÏLYS FOURNEAUX

FAIRE RIMER ÉTHIQUE ET POLITIQUE : MISSION IMPOSSIBLE ?

Maïlys Fourneaux Anticor sur Rideau Rouge

Cette semaine, rencontre avec une association de lutte contre la corruption plutôt bien connue du grand public : Anticor. Fondée en 2002 en réaction à la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle, l’association engage notamment des poursuites judiciaires dans des affaires de corruption.

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Elle disposait jusqu’à il y a encore quelques semaines d’un agrément de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, qui lui permettait d’agir en justice, mais cet agrément a été annulé car l’arrêté de 2021 signé par Jean Castex, portant sur son renouvellement, était entaché d’une erreur de droit. L’association était engagée dans de nombreuses procédures en cours, dont l’attribution du Mondial de football au Qatar, l’enquête pour prise illégale d’intérêts visant le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler, le dossier de la cession de la branche énergie d’Alstom à General Electric ou encore les contrats russes d’Alexandre Benalla. A mon micro aujourd’hui, Maïlys Fourneaux, salariée de l’association.

« La corruption, selon Anticor, c’est la captation par des responsables politiques ou administratifs du pouvoir, pour leur intérêt personnel ou pour l’intérêt de leurs proches. »

Les trois pépites de cet échange :
1) L’association Anticor promeut des mesures telles que le casier judiciaire vierge, la formation et la sensibilisation des élus aux risques de corruption, la création de groupes de contre-expertise citoyenne, l’encadrement des allers-retours public-privé ou encore la mise à disposition des données publiques par les collectivités locales. Pour que ces mesures soient adoptées, l’association porte des actions de plaidoyer qui incitent les candidats aux élections à s’en saisir, mais sans obligation aucune. Et comme nous le disons souvent sur Rideau Rouge, tant que le rapport de force reste en leur faveur, il y a peu de chances que les choses avancent.
2) Le régime politique défendu par Anticor est la démocratie représentative et non la démocratie directe. Leur combat vise avant tout à faire en sorte que les citoyens reprennent confiance dans les institutions et dans les élus censés les représenter. Le problème, à mon sens, c’est que ce combat part du postulat que la démocratie représentative est un régime politique vertueux. Or, élire des représentants et leur faire confiance, c’est forcément se défausser d’une partie du pouvoir qui nous incombe en tant que citoyen, ce qui est déjà une forme de corruption.
3) Le montage d’un dossier prend du temps : il faut d’abord que des militants s’en saisissent, qu’ils le présentent en réunion, que le sujet défendu entre dans le champ d’action de l’association… Vient ensuite le temps de constitution du dossier puis la remise de ce dossier entre les mains de la justice. En somme, pour qu’un dossier aboutisse, deux conditions doivent donc être réunies : il faut, d’une part, des personnes suffisamment engagées pour le porter pendant plusieurs mois voire plusieurs années ; et d’autre part, une justice saine qui fasse son travail. Désormais sans agrément judiciaire, vous imaginez bien que cela va encore plus compliquer les choses ! Dans ce duel entre le pot de terre et le pot de fer, la corruption morale et financière semble avoir encore de beaux jours devant elle.

Merci à tous d’avoir écouté cet épisode et à la semaine prochaine pour une nouvelle rencontre hors des sentiers battus.

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